Thérèse Desqueyroux

(François Mauriac)

  Ma note : 17/20

  • Littérature Classique
  • Papier

    5 citations dans ma p'tite bibli


    J'ai rencontré François Mauriac en classe de 4ème, grâce à ma génialissime prof d'histoire-géo qui nous prêtait des livres de sa bibliothèque personnelle. Le Sagouin m'avait alors bouleversée, mais de Thérèse Desqueyroux je n'avais qu'un souvenir vaguement nauséeux. J'étais trop jeune à l'époque, trop Anne, pour comprendre ce chef-d’½uvre. Aujourd'hui en revanche, je me sens plus proche de Thérèse. Je partage son besoin permanent de (se) comprendre tout autant que son goût pour la solitude. Et si je ne me suis pas engagée dans un mariage sans âme, c’est que contrairement à elle, j’ai pu prendre mon temps. Je ne suis pas passée loin d’un Bernard, mais heureusement j’ai su dire stop à temps. Je frémis en imaginant ce que ma vie aurait pu être...

    Dans un style entêtant, qui vous colle à la peau comme la moiteur des étés d'Argelouse, l’auteur revient sur le cheminement qui a conduit son héroïne où l'on sait. Résumer cette ½uvre à la simple histoire d'une femme ayant tenté de tuer son mari n'est pas plus pertinent que de comparer un chaton à un lion ! Thérèse est ô combien plus complexe, ô combien plus intense qu'une simple ménagère désespérée.

    J'allais vous répondre : « Je ne sais pas pourquoi j'ai fait cela » ; mais maintenant, peut-être le sais-je, figurez-vous ! Il se pourrait que ce fût pour voir dans vos yeux une inquiétude, une curiosité – du trouble enfin : tout ce que depuis une seconde j'y découvre. »

    Sans bons sentiments ni mauvaises excuses, assumant pleinement ses contradictions, elle nous happe dans son univers torturé. Étonnant comme en quelques années l'impression d’injustice peut se déplacer. La nausée qui m'avait prise lors de ma première lecture était un sentiment adolescent : « Après une tentative de meurtre elle s'en sort tranquillement ? Quelle histoire immorale ! » . Le sentiment qui me submerge aujourd'hui est tellement plus profond, viscéral. Je suis abasourdie par la violence du conservatisme bourgeois envers les femmes. Ce n'est pas simplement "Sois belle et tais-toi", mais "Sois belle, sois riche, sois sans aucune ambition. Sois lisse, tellement lisse qu'on ne te verra plus. Et tais-toi, ainsi tu n'existeras plus". Sordide.

    Claude Mauriac, un des fils de l’auteur, écrit dans sa postface :

    L'aveu de Flaubert sur Madame Bovary, on aurait pu l'entendre (et il me semble l'avoir entendu) de la bouche même de François Mauriac : « Thérèse Desqueyroux, c'est moi. » De tous ces personnages, c'était sa préférée.

    Comme je vous comprends monsieur Mauriac. Thérèse m'a chavirée. D'aucuns la trouvent froide, sans c½ur, je l'ai trouvée passionnée, débordante d'une vie retenue qui – cruelle ironie – l'empoisonne insidieusement. Comment exister quand on a de l'esprit face à la lourdeur d'un mari au prosaïsme écrasant ? Comment survivre dans cette mélasse de convenances ?

    Comment ne pas se mettre à sa place ?

    Comment imaginer qu'on aurait pu agir différemment ?


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