Mes citations
Mais personne ne connaît plus la sensation de sécurité. Voilà pourquoi nous courons tous comme des fous : nous ne voulons pas avoir le temps de penser. Et nous sommes tous pareils... alors nous nous étourdissons d'occupations pour ne pas réfléchir.
Je pris sa main dans la mienne et nous sortîmes de ce lieu dévasté ; et de même que, longtemps auparavant, les brumes du matin s'étaient dissipées au moment où je quittais la forge pour la première fois, de même les brumes du soir se dissipaient-elles alors : et dans toute la vaste étendue de paisible lumière qui se révéla à mes yeux, je ne vis paraître l'ombre d'aucune séparation nouvelle entre Estella et moi.
Et comment aurais-je pu la contempler sans compassion, en voyant son châtiment dans la ruine qu'elle était devenue, dans sa profonde inadaptation au monde dans lequel elle était placée, dans la vanité d'un chagrin qui était devenu une idée fixe, comme la vanité de la repentance, la vanité du remords, la vanité du sentiment d'indignité et d'autres vanités monstrueuses qui ont été autant de malédictions ici-bas ?
Cependant, un certain balourd au teint sombre, qui refusait d'emplir son verre et de faire tout ce qu'on lui proposait d'autre, et dont le maître d'équipage déclara ouvertement qu'il avait le c½ur aussi noir que sa figure de proue, proposa à deux autres balourds de plonger l'humanité entière dans l'embarras ; il y parvint si bien (car la famille Balourd jouit d'une influence considérable en politique) qu'il fallut la moitié de la soirée pour réparer les dégâts.
C'est ainsi que, d'un bout à l'autre de notre vie, nos bassesses et nos faiblesses les plus graves sont généralement commises à cause des gens que nous dédaignons le plus.
Dans le petit univers où se déroule l'existence des enfants, quel que soit leur éducateur, il n'est rien qui soit aussi finement perçu ni aussi finement ressenti que l'injustice. Ce n'est sans doute qu'à de petites injustices qu'un enfant peut se trouver exposer ; mais l'enfant est petit, et son univers est petit, et son cheval à bascule se dresse à autant de mains de hauteur, compte tenu de l'échelle, qu'un cheval de chasse irlandais bien charpenté.
[...] la vue d'une montagne ou d'une vallée finit toujours par pénétrer la couche la plus épaisse et la plus rassie de votre conception du monde. Dans un alpage, la vie paraît meilleure.
Si vous voulez mon avis, toute la Réforme est imputable à la bière forte. Le vin reste la boisson catholique parfaite. Il endort les gens et les rend conciliants. La bière les transforme en ergoteurs. Et voyez un peu les pays qui boivent beaucoup de bière. Ils sont presque tous protestants. Et ceux où l'on boit beaucoup de vin ? Tous catholiques.
Les médecins allemands se sont toujours considérés comme les égaux de Dieu. En réalité, c'est sans doute encore pire que cela. Dieu se prend probablement pour un médecin allemand.
[...] Alfred Loritz, le populiste de droite, s'était levé au nouveau parlement en exigeant une amnistie immédiate et générale de tous les criminels de guerre, sauf les plus coupables – il désignaient par là ceux qui étaient déjà morts ou en fuite.
No one tells you how it will be when you have a child. No one tells you it's going to be worry, worry, worry, worry, worry. World without end. How they hold your fate, your survival in their hands, whereas before you were free, free and didn't know it.
They were great men, with huge flaws, and you know what – those flaws almost made them greater.
Cette nuit-là elle rêva. Elle entendit la terre pleurer. À l'aube elle écouta l'appel claironnant de la ville. Des rues qui attendaient ses pas. Des portes à ouvrir, des livres à lire, sa vie telle qu'elle l'avait vécue. Et toutes ces journées à traverser, les journées interminables, les nuits, les pièces silencieuses. Il n'y avait pas d’Éden, il n'y en aurait pas, pas d'élan flamboyant, pas de métamorphose. Rien que du temps, et des tâches allégées par le souvenir de l'amour, et des jours comme tous les autres où elle mettrait un pied devant l'autre et poursuivrait sa route, obéissant au destin.
La simple vue d'un livre sur la console du couloir ou sur sa table de chevet, le nom de l'auteur ou le titre sur la tranche, le souvenir d'un personnage – ses épreuves, son malheur – la détachaient du temps ordinaire, provoquaient en elle un sentiment fort, un sentiment d'entente avec l'auteur en question.
Tess raconta tout à son amie : la mère morte, la s½ur morte, l'enfance, l'homme. Dit à voix haute cela ne parut pas si terrible. Il lui arriva même de rire. Ce n'était pas drôle, non, mais ce n'était pas tragique non plus.
Mais pas une seule fois dans sa vie elle n'avait eu une once de courage. Elle avait cherché, systématiquement, une validation tacite à chacun de ses actes – comme privée de volonté propre, comme si un père ou une mère, ou Dieu en personne était assis en permanence sur son épaule droite, exerçait l'ascendant sur ses pensées et ses décisions. Et lorsque la validation n'avait pas été obtenue, ou qu'elle allait lui être refusée, elle se réfugiait dans sa placide passivité.
La compagnie des autres lui laissait une impression de solitude et même, parfois, de danger.
Les longues années qu'ils avaient passées ensemble lui avaient enseigné que le mariage le plus ennuyeux n'est pas une faillite, tant qu'il garde la dignité d'un devoir.
C'était ainsi dans ce vieux New York, où l'on donnait la mort sans effusion de sang ; le scandale y était plus à craindre que la maladie, la décence était la forme suprême du courage, tout éclat dénotait un manque d'éducation.
Pourquoi émanciper une femme qui ne se doutait pas qu'elle fût sous un joug ? Le seul usage qu'elle ferait de son indépendance serait d'en offrir le sacrifice à l'autel conjugal.